La sclérose latérale amyotrophique (SLA), connue également sous le nom de maladie de Charcot, est une maladie neurodégénérative qui se déclare à l’âge adulte. Elle entraîne une invalidité progressive et la mort, avec une survie médiane de 2 à 3 ans après l’apparition des symptômes. Actuellement, seul le riluzole a démontré un effet significatif, mais modeste, sur la survie. L’identification de traitements plus efficaces est limitée par l’hétérogénéité de la maladie, qui crée un biais dans l’appréciation de la réponse aux traitements.
Le projet européen MIROCALS, financé par H2020, visait à répondre à ce défi.
Le projet MIROCALS a été financé par le programme H2020 de la Commission européenne en partenariat avec la MND Association of England Wales and Northern Ireland. L’étude a été coordonnée par le Dr Gilbert Bensimon, Hôpital universitaire de Nîmes, Université de la Sorbonne de Paris et Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, France, et le Professeur P Nigel Leigh, Brighton and Sussex Medical School, Universities of Brighton and Sussex, Royaume-Uni.
Cibler la neuro-inflammation
Les chercheurs du consortium MIROCALS, constitué d’une cinquantaine de laboratoires et organismes de soutien de la recherche, ont identifié l’inflammation du système nerveux central, largement présente dans la maladie de Charcot, comme cible thérapeutique prometteuse. En particulier, le déficit numérique et fonctionnel de cellules T immunorégulatrices CD4+FOXP3+ (Tregs) est associé à la gravité, à la progression et à la survie de la maladie. Or, les Tregs ont besoin d’une cytokine du système immunitaire, l’interleukine-2 pour leur génération, leur activation et leur survie.
Dans un précédent essai de phase IIa, les chercheurs ont montré qu’une faible dose d’interleukine-2 est sûre, bien tolérée et conduit à une augmentation dose-dépendante du nombre et de la fonction des cellules T chez les personnes atteintes de SLA. Ce nouvel essai clinique de phase IIb visait à évaluer l’efficacité clinique et l’innocuité de l’Iinterleukine-2 sur une période de 18 mois. Les résultats ont été publiés dans la revue The Lancet le 9 mai 2025.
L’essai clinique
220 participants de 18 à 76 ans et des deux sexes, à un stade précoce de la maladie et avec un diagnostic de SLA probable ou confirmé, ont participé à l’essai. Ils ont reçu en plus d’un traitement oral de riluzole, soit une faible dose d’interleukine-2 (2MIU, milli-unité internationale/L), soit un placebo, par injection sous-cutanée quotidienne pendant 5 jours tous les 28 jours, sur 18 mois.
La Banque d’ADN et de Cellules de Généthon, première banque européenne pour les maladies génétiques, a tenu le rôle de banque « centrale » responsable du traitement et du stockage de tous les échantillons biologiques (plasma, cellules, liquide céphalo-rachidien) avant analyses. Garante de la traçabilité et de la sécurité de ces échantillons, la biobanque évryenne a mis en place les procédures de prélèvement et de transport. Au total, 53 547 échantillons de sérum, de cellules mononuclées du sang périphérique (PBMC) et de liquide céphalo-rachidien ont été réceptionnés et stockés à -80 °C et dans l’azote liquide à -196 °C, puis envoyés aux laboratoires en fonction des besoins de recherche. La banque a également extrait l’ADN du sang des 220 patients au moment de leur inclusion dans l’essai clinique, puis l’ADN des cellules PBMC en cours d’essai.
La Banque d’ADN et de Cellules fait partie des 23 infrastructures technologiques du biocluster Genopole
L’évaluation a porté sur la survie à 640 jours, sur la sécurité du traitement et sur des biomarqueurs, notamment les cellules T régulatrices (Tregs), la chaîne lourde phosphorylée du neurofilament dans le liquide céphalo-rachidien (CSF-pNFH, présente en concentration élevée chez les malades), et le ligand 2 de la chimiokine dans le plasma et dans le liquide céphalo-rachidien (CCL2, impliqué dans l’inflammation pathologique).
Sécurité et amélioration de la survie
Aucun effet indésirable n’a été rapporté au niveau des signes vitaux, des électrocardiogrammes et des examens physiques ou neurologiques.
À 640 jours, on comptait 49 décès dans le groupe placebo et 41 dans le groupe traité, soit une diminution de 19 % du risque de décès, mais statistiquement non significative. Pour tenir compte de la problématique de l’hétérogénéité des malades et de la réponse au traitement, les auteurs se sont intéressés au biomarqueur CSF-pNFH car il présentait une interaction significative avec le traitement. Le groupe de patients a été divisé en classes en fonction de la mesure de CSF-pNFH (sous la limite de quantification – faible (≤3700 pg/mL) – élevée), sur lesquelles des analyses séparées ont été relancées.
L’effet du traitement dans la classe « faible CSF-pNFH » a montré une diminution significative du risque de décès de 48 %, soit d’environ deux fois, par rapport au placebo. L’effet est resté significatif lors du regroupement de deux strates les plus faibles, qui représentent 79% du groupe total. Il n’était pas significatif dans la classe « CSF-pNFH élevé ».
L’interleukine-2 a également augmenté de manière significative le nombre de cellules T régulatrices et diminué le taux plasmatique de ligand 2 de la chimiokine à tous les stades de l’étude.
Ces résultats devront être confirmés par une étude clinique plus approfondie et d’autres programmes de traitement devront être explorés pour les cas de taux élevés de CSF-pNFH associés à une progression rapide de la maladie, qui constituent un défi majeur.